dimanche 16 mai 2010

L'Homme malchanceux

Tranche d'âge : à partir de 4 ans
Durée : 4 mn

Il était une fois un homme malchanceux. Il aurait bien aimé avoir de la chance mais rien de ce qu’il entreprenait ne réussissait.
S’il achetait un agneau, le lendemain il le trouvait mort dans la bergerie. S’il décidait un beau matin de couper l’herbe de son pré pour en faire du foin, il se mettait à pleuvoir. Et si quiconque venait à passer devant sa maison, son chien le mordait. Bref, la chance le fuyait toujours.
Il se souvenait bien du jour où sa mère lui avait dit : « Toi, mon pauvre petit, tu n’as vraiment pas de chance ! » Depuis ce jour, il était poursuivi par cette malédiction et, comme rien ne réussissait chez lui, il était très pauvre.
Son unique vache s’ennuyait toute seule dans son pré. Alors, bien qu’elle en fût très malheureuse, elle ne donnait pas beaucoup de lait au fermier. Elle passait son temps à regarder avec envie le troupeau du voisin. Elle aurait tellement aimé gambader parmi ses compagnes et déguster l’herbe bien grasse de son champ.
Un jour, elle remarqua une petite nouvelle qui lui ressemblait étonnamment. Comme elle, elle avait une belle robe tricolore. Comme elle, elle avait des taches de couleurs autour des yeux en forme de lunettes. Elle passa la journée à ruminer tristement son malheur mais le soir, une idée brillante lui vint à l’esprit. Elle eut juste le temps d’appeler la jeune vache avant la traite, pour lui confier son secret.
- Bonne idée ! dit celle-ci, ravie d’apporter un peu d’aventure à sa vie trop monotone. Donnons-nous rendez-vous ici, demain matin si tu veux.
- J’y serai, répondit notre vache.
Le lendemain, elles se retrouvèrent comme prévu et mirent au point leur stratagème. Elles décidèrent de procéder à un échange quelques jours, le temps que le fermier pauvre puisse récupérer assez de lait pour gagner un peu d’argent. Ce n’était pas difficile, elles devaient parcourir un petit bout de chemin commun pour gagner leur étable chaque soir et c’est à ce moment là qu’il était possible de se « tromper » de ferme.
Au bout de trois jours seulement, le fermier malchanceux s’aperçut que sa vache donnait de plus en plus de lait. Les deux premiers jours, il crut qu’il s’était trompé en pesant son bidon de lait mais le troisième jour, il dut se rendre à l’évidence : sa vache était en forme et lui donnait beaucoup de lait. Il pensa d’abord tristement que cela ne durerait pas puisqu’il n’avait pas de chance, mais il décida tout de même de profiter de cette aubaine en fabriquant du beurre et du fromage qu’il alla vendre au marché.
Ses produits eurent tout de suite un grand succès. Il s’acheta alors une nouvelle vache, puis une deuxième, une troisième et au bout de trois mois, il avait un vrai troupeau qui lui procurait beaucoup de lait.
Le jour où il comprit que la chance était enfin avec lui, il décida d’entreprendre de grands travaux d’embellissement de la ferme. Il eut envie surtout d’agrémenter sa maisonnette et de la rendre plus confortable. Il la rendit si belle et accueillante qu’il organisa une grande fête.
Et c’est à cette occasion qu’il rencontra Mélusine, la plus jolie fille de la région qui était aussi la plus douce et la plus intelligente. Quand il comprit qu’elle voulait bien l’épouser, il se dit qu’il était l’homme le plus chanceux du monde. Chaque matin en se réveillant, il se le répétait et son bonheur faisait vraiment plaisir à voir.
Mais qu’étaient donc devenues nos deux vaches jumelles pendant ce temps ? Ah ! Elles avaient bien réussi leur coup, elles en étaient très fières. Et maintenant, si le fermier n’avait plus besoin de leur aide, elles procédaient encore quelquefois à des échanges, juste pour le plaisir de s’amuser un peu.